détroit windsorDe là où nous étions, la vie était douce, le temps clément, les gens agréables et la vue magnifique, on voyait Détroit de l’autre côté de la rive. Un grand lac et une rivière éponyme de la ville convoitée nous séparaient du pays voisin, nous étions à Windsor et nous allions bientôt passer la frontière.  Nous étions encore du côté canadien, mais pourtant déjà avec un pas du côté du voisin. Les gens chez qui nous logions à travers le site Couchsurfing étaient des Canadiens, mais la proximité avec la fameuse ville de l’automobile américaine marquait les habitudes. Des gens de leurs familles travaillent aux États-Unis tout en habitant au Canada et eux-mêmes vont à Détroit quelques fois par mois pour faire des courses ou pour passer du temps.

Windsor, ville d’histoire et de jumelage

Il y aurait beaucoup à dire sur Windsor, ville de l’Ontario au Canada, nous n’y avons pas passé beaucoup de temps, mais y revenir serait un plaisir. C’est d’ailleurs pourquoi, bien que Québec soit dans les premières villes à être colonisé, c’est la région des Grands Lacs qui sera la partie la plus utilisée au départ. Car un microclimat est créé par la présence des lacs et permet une température beaucoup plus clémente que dans le reste du pays. La présence de la route des vignobles le montre aussi. Beaucoup de noms français sont présents dans les rues de Windsor, les Franco-ontariens présents prouvent de la longue présence de la communauté francophone.

Les gens chez nous logions durant ces 2 jours avaient une petite ferme en plus de leur activité professionnelle, agréable et attentionnée, férus des histoires et mêmes intérêts politiques que nous, nous étions comme dans un cocon. Beaucoup de conseils et de choses à voir, notamment la plus grande librairie de livres usagés d’Amérique ! C’est en parlant avec eux aussi que l’on se rend compte que Windsor bien que ville Canadienne, dépend beaucoup de sa voisine économiquement parlant, une grande partie de sa population vie par ou grâce Détroit. Il était temps pour nous d’aller du côté de l’Oncle Sam !

Du côté américain

Détroit frontièreNous étions un peu stressés par le passage de la frontière, car l’Escargot nous semblait la proie idéale pour un douanier zélé ! Les peurs n’auront finalement pas été confirmées, outre l’attente d’une heure et demie afin d’avoir les papiers, l’escargot aura bien été fouillé, mais sans plus. Les clés remises dans le contact, le moteur allumé et nous voilà prêt à foncé dans la ville qui a fait faillite !

Détroit est une ville mythique, non pas grâce à Eminem, mais elle représente l’Amérique victorieuse et ayant un modèle économique faisant ses preuves. Jusqu’à 2008, lorsque les usines automobiles de Ford, GMC et Chrysler fermeront et que 400 00 emplois seront perdu : la ville demandera la faillite. La ville était florissante, de bons salaires pour les ouvriers et le plein emploi, la crise fera de Détroit une ville fantôme passant d’un million et demi d’habitants à 700 000. (voir documentaire de Michael Moore “Roger et moi” sur la ville de Flint)

détroit abandonnéC’est quasiment 9 ans après cela que l’Escargot fait ses premiers kilomètres dans la ville du Do It Ourselves. C’est dans les temps de crise qu’il faut apprendre à s’organiser. Les habitants de Détroit ne feront pas exception à cette maxime et une initiative particulièrement fera parler d’elle jusque dans le documentaire Demain comme étant un exemple : L’agriculture urbaine.

Une ville abandonnée

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L’immeuble des loges maçonniques de Détroit

Quand on arrive à Détroit depuis la frontière canadienne, on se retrouve rapidement dans le centre-ville, les gratte-ciels se battent entre eux à qui sera le plus haut et la face que nous montre la ville est bien la scène de théâtre comme quoi la finance est toujours là. Cependant, dès que l’on passe la voie du chemin de fer un boulevard, la banlieue citadine est présente et nous montre l’arrière du décor. Perdre 50% de sa population en quelques années, ce n’est pas rien et ça laisse des traces forcément, alors quand en plus cela se passe avec la crise des subprimes qui a évincés des milliers des familles à travers les États-Unis on s’imagine bien qu’une ville avec 400 00 emplois en moins doit être assez touché. On l’avait vu en image, mais le voir en vrai est autre chose. Une fois que l’on arrive dans les quartiers résidentiels de la ville, il n’y a plus  qu’un tiers des maisons qui semblent avoir âmes qui vivent.

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Les immeubles abandonnés aux côtés du sport buisness

Nous avions vu quelques documentaires qui traitaient de l’agriculture urbaine et ce qui se passe à Détroit, on se disait que ce serait bien pour le projet, ça allait en plein dedans. Nous étions loin de nous imaginer la taille de la zone dévastée. Alors que l’on pensait les trouver en déambulant, c’est un immense champ de maisons abandonnées, d’immeubles vides et d’anciennes usines sans âmes. Au milieu de tout cela se trouvent parfois des oasis de vies, mais toujours uniformes. Au final on ne les aura pas trouvés, ce sera pour une autre fois, nous avions sous estimés la grandeur du terrain de jeu de la reconstruction sociale, mais l’idée reste en tête. En discutant avec une personne de la ville nous apprendrons que dans les quartiers résidentiels où il y a des espaces vides entre les maisons correspond en fait à une maison qui a brûlé. Les pompiers essayaient au départ de lutter contre les incendies, cependant les maisons étaient forcément inhabitables par la suite et cela devenait plus des squats ou des terrains de jeux pas forcément très appréciables. détroit abandonnéOutre ces faits, c’était surtout que ces maisons devenues taudis devenaient dangereuses et que la sécurité devenait dure à garantir, car des enfants ou des gens du quartier allaient dedans. Alors pour pallier à cela, on préfère les laisser brûler au complet pour les raser et ainsi avoir un terrain vierge. L’histoire ne dit pas cependant à qui revient les terrains et les profits par la suite ni qu’est-ce qu’il adviendra quand tout aura brûlé et que la ville reprendra son essor comme elle est en train de le faire.

détroit abandonnéOn ne pouvait pas rester longtemps dans la ville, nous déambulions au travers des édifices des points d’intérêts que nous nous étions fixés au fur et à mesure que notre safari avançait. Terme péjoratif et pourtant on s’est rendu compte que l’on pouvait agir de la sorte, honte sur nous. Dans la voiture, caméra à la main pour prendre des photos, et par la suite quelques vidéos, témoignage de ce que l’on voyait sans jamais descendre, une certaine peur de l’inconnu, une peur de ce que l’on voyait indiciblement, alors que c’est pourtant ce que nous visions et pouvions côtoyer ailleurs. Cependant, il faut admettre que la misère est plus effrayante loin de chez soi, on n’a pas de replis possibles, pas de connu vers lequel se diriger. C’est alors que nous étions en train de nous diriger vers le marché, que nous nous sommes perdus une nouvelle fois dans l’aventure. Roulant tranquillement, nous avons vu au loin ce qui semblait être un terrain vague avec des installations.

De l’art militant

C’est à la fin de l’exposition, que nous arriverons par l’entrée et que nous aurons des explications. C’était en fait un terrain qui a servi d’exposition à des artistes et qui avaient été le fait de MBAD museum African Bead Gallery. Un magasin de perles africaines qui est aussi une résidence d’artistes. On aura été subjugué par les œuvres exposés, vraiment très parlante sur une certaine domination de la société.

 

détroit abandonné travailÀ la suite de notre visite, nous serons finalement en direction du marché puis sur le départ de la ville. Comme si elle avait voulu nous dire qu’elle valait le coup et que la lutte peut continuer, comme en témoigne l’histoire de la ville et certains monuments que les actuels dirigeants doivent vouloir oublier. Détroit était une ville ouvrière déchue qui se fait reconquérir par la finance, son attraction est forte, son climat est doux et les lacs à proximité. Pour la première ville américaine nous aurons passage aura été plus touristique que servant de témoignage, c’était pour nous mettre dans le bain. Mais nous y retournerons.


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